Verviers en pan de bois ou colombages
Écrit par Viviane Bourdon   
Dimanche, 09 Mai 2010 14:33
Autrefois, c’est à dire au Moyen-âge, les bonnes gens du pays de Verviers, riches ou pauvres, étaient logés à la même enseigne : celle des pans de bois ou colombages.
Le Musée Renier les expose jusqu’au 27 juin 2010. Remarquable. Passionnant.

Tout part d’une thèse publiée dans les Carnets du patrimoine. Son auteur puis metteur en scène de l’expo est David Houbrechts, docteur en philosophie et lettres de l’ULg. Pris pour son sujet d’un vif engouement, il a réussi à le communiquer à des collègues japonais. Ces derniers auront en 2011 l’occasion d’admirer les pans de bois wallons à Tokyo et Kobe. Comme Verviers a conservé beaucoup de témoignages de cette...
architecture, notre ville pourrait bien s’y situer en best of.


Aux origines de notre cité, il y eut une villa gallo-romaine, davantage exploitation agricole que villégiature. En pans de bois ? On en rêve car voilà qui redorerait le blason de ce type de construction remontant à la préhistoire. En fait, les matériaux requis se trouvaient pratiquement sous la cognée de ces premiers Verviétois. La forêt entourant les bords de Vesdre était composée principalement de chênes pédonculés dont les frondaisons pouvaient s’élever jusqu’à quarante mètres pour un tour de taille frisant les deux. L’idéal pour un maître-charpentier dont le travail spécialisé est scrupuleusement détaillé en images au Musée. D’énormes grumes étaient tirés les fameux “bois longs” qui d’un seul tenant arrivaient pratiquement au toit de l’édifice. À voir  sur la maquette d’une tannerie de Stavelot démolie sans aucun état d’âme en 1953.


Par la suite, on se résigna aux “bois courts” pour cause ( déjà ) d’utilisation trop intensive des chênaies. Bien sûr, ces poutres-là étaient plus aisément transportables soit par charrois, soit par flottaison. Liège avait son port au bois en berges de Meuse où selon la technique en vigueur, les arbres abattus en hiver étaient façonnés, ajustés, assemblés, numérotés avant d’être démontés, livrés “ clef sur porte” à l’emplacement choisi et y élevés sur soubassement en dur pour éviter l’humidité ascendante.

 

L’âme de bois ainsi installée, restait outre la pose du toit et des planchers à boucher les trous de l’ossature par du torchis. Fait d’argile, de chaux, de minéraux, de végétaux et de poils d’animaux, il est accroché intérieur et extérieur sur une paroi de baguettes tressées ou de planchettes grossièrement débitées. On passe ensuite aux couches de finition de ce qui est devenu un mur. Plus tard, le torchis sera remplacé par des briques et la pierre s’utilisera en lieu et place de bois pour les chambranles des portes et fenêtres. Cette évolution prit quelques siècles. C’est ainsi que l’on vit  la Maison Moulan ( XVIe) se doter au XVIIe d’une nouvelle façade avec un redan en lieu et place de l’ancienne dont on peut penser les pans récupérés ailleurs. Car ces maisons que l’on voit toutes de guingois et que l’on croit prêtes à s’écrouler sont en réalité solides parce que souples et collant au terrain. Pas trop mal isolées compte tenu de leur époque, elles devaient défier les siècles sauf incendie, malheur ou... bonheur des temps lorsque Verviers se prit de prospérité et de notoriété.


 


“La qualité de ses draps l’ouvre au monde”, dit Mme Deblanc, conservateur du Musée, “à d’autres modes avec en plus le besoin de paraître”.
Petit à petit, le pan de bois quitte les façades, est refoulé aux arrière-cours, là où on ne le voit pas. Ailleurs, on le dissimule sous une couche de plâtre. Il se réfugie alors dans les impasses et les ruelles où vit dans des conditions misérables tout un menu peuple. C’est là que la fin du XIXe siècle le rencontre et le jette bas, non sans que des Weber, Pirenne ou Jamsin ne le figent pour l’éternité et le plaisir de nos yeux émerveillés, dans leurs dessins, photos, pastels etc.


Mon Dieu, c’était cela Verviers en colombages dont bien plus qu’on ne le pense, ont survécu à notre insu et n’attendent qu’à être découverts, restaurés.


 

Nous les trouvons plaisants extra muros, alors pourquoi pas intra muros. Car Verviers reste bien la seconde ville belge par le nombre ses colombages même si les pans de bois détruits encore au cours du XXème siècle (et toujours aujourd’hui hélas !!) sont innombrables. Quelques souvenirs tangibles ont été conservés au Musée : les fenestrages XVIe de la maison Del Court, anciennement place du Marché, ont été déplacés dans la cour du Musée lors de la destruction en 1922.


Dix ans plus tard, la maison voisine, dite « maison espagnole », voyait la partie supérieure de son pignon sauvée par Maurice Pirenne. Les planches de rives richement sculptées, les consoles à tête humaine, les fenêtres à meneaux avec leurs petits vitraux et leurs volets de bois aux ferrures élégantes…sont elles aussi remontées dans la cour Sud du musée des Beaux-Arts rue Renier, où ces souvenirs d’une architecture traditionnelle parlent aux visiteurs de la vie quotidienne verviétoise au XVIe siècle, expliquée, commentée dans le cadre unique de l’Oeuvre du mois.


Tous les lundi, mercredi et samedi de 14 à 18 h, dimanche de 15 à 18 h
Visites guidées pour groupes sur demande 087/ 33.16.95

Dimanche 16 mai 2010, une visite guidée des pans de bois aura lieu à 15 h, Entrée gratuite

 

 

Mise à jour le Mardi, 11 Mai 2010 15:33