Le journal de bord de Loreta Mander, avril 2014 |
Écrit par Loreta Mander | ||
Samedi, 03 Mai 2014 09:26 | ||
Lundi 7 avril 2014 Aujourd’hui c’est piscine, enfin je veux dire par là… hôpital ! Rendez-vous à 8h (ça me fait lever trop tôt), mais retour à 10h. Tout risque de diabète est écarté. Encore bien, sinon il aurait fallu supprimer sel et sucre de mon régime. A ce train-là, il ne me reste plus qu’à sucer des branches d’arbre. Ouf et très rassurée. Mes vertiges viendraient des yeux. Non pas que je les regarde de travers, mais parce que ma vue baisse encore. Ca devient très difficile de lire de près (même avec des lunettes) et je fatigue à regarder de loin. T’imagines…. Tu ne peux plus regarder ni de près, ni de loin, tu ne peux plus manger ce que tu veux (même pas du chocolat), tu ne peux plus boire que de l’eau (plate de surcroît), t’as mal au bras, t’as les pieds engourdis, t’es fatigué…… misère, y-a-t’il un bon entrepreneur spécialisé dans la retape des vieux édifices croulants ? Help….. Est-ce dû à l’âge ou à la quantité astronomique de produits avalés ces dix dernières années ? La coquetterie féminine me ferait dire qu’il s’agit plutôt des produits chimiques. Ma vue baisse de plus en plus. Que ça soit de loin ou de près, sans un outil optique, je n’y vois que dalle. La vieillesse ? Les produits ? Le crabe ? Nul ne le sait, sauf peut-être l’ophtalmo qui va me rééquiper. Ne pas oublier de prendre rendez-vous. Samedi, nous avons passé une super soirée à l’anniversaire de Classic21. Nous y avons retrouvé plein d’amis, que nous n’avions plus vu depuis trop longtemps. Pour la première fois depuis très longtemps, nous avons pu regarder les concerts à l’aise et pas au travers de l’objectif. Le trip Bretagne est réservé. Nous avons trouvé une chouette location près de Ploumanach, la côte de granit rose. Plus on regarde les photos et les cartes, et plus on se dit qu’il sera difficile d’en revenir.
Mardi 8 avril 2014 Direction Wissant avec Maud et Mila. Entre filles, en somme. Trois générations de nanas, 2 éclopées et une bien vaillante. Ca promet d’être agréable. Je voulais leur faire découvrir ce superbe littoral. C’est mon cadeau de fête des mères à l’avance et l’anniversaire de Maud en retard. Pour Mila, ça sera juste du fun avec maman et nonna. A moi les châteaux de sable, le ramassage de coquillages, mais je lui confierai aussi la tâche de trouver de jolis petits galets. Mais ça me fait tout drôle de laisser mon cœur jumeau avec son chat et sa guitare (pas la guitare du chat hein !). Mais, je les soupçonne d’être contents de se retrouver à deux pour faire ce qu’il leur plaît. En deux mots, se lever tard, glandouiller, manger de tout en écoutant de la musique. J’exagère, vous le comprendrez bien. Je ne trouve pas les mots pour définir ces 3 jours intimes. Du vent, du soleil, des jeux dans le sable (que de souvenirs remontent à ma mémoire), réassort du stock de coquillages et de galets, les sourires de mes deux nanas et plein de bonne humeur. Quel beau tas de moments présents. Je vais les ranger et les ressortir au fur et à mesure des besoins. J’ai déjà quelques sacs bien remplis. Comment définir l’amour d’une mère envers son enfant ? Difficile à dire. C’est animal, merveilleux. Surtout voir sa fille être mère à son tour. Plein de choses me reviennent à l’esprit. On n’apprend pas ce métier de maman, on avance avec son vécu et ses propres expériences, on fait de son mieux. On vit leur enfance, leur adolescence et le rythme de leur vie. On vit des peurs, des angoisses (ces fameuses peurs de mal faire), mais tellement de grands bonheurs. On retrouve dans ses petits-enfants les mêmes sourires, les mêmes tics de langage, les mêmes gestes. C’est peut-être cela qu’on appelle la roue qui tourne. Aurais-je assez de temps pour devenir arrière grand-mère ? Ca serait un superbe cadeau, ça ! Sauf si je deviens gâteuse, parce qu’alors ça serait un cauchemar pour eux tous.
Vendredi 11 avril 2014 Je me lève et ça craque dans le dos. Et zut, le dos légèrement bloqué. Il ne manquait plus que cela. J’ai dû prendre froid à Wissant ou je n’ai pas trop fait attention à mes gestes maladroits. Un patch d’anti-inflammatoire en espérant que ça partira vite. Nondidju, que ça fait mal. Mon cœur jumeau voit bien que je traîne la patte, mais, comme d’habitude, je fais la forte et lui fait croire que tout va bien. Mais, il n’est pas dupe le tourtereau. Il essaye de m’obliger à me coucher et rester tranquille, mais ça, t’as vu. Moi, ne pas bouger, mais c’est comme manger un croustillon sans sucre impalpable (qui finit toujours sur tes souliers noirs comme des pellicules). C’est contre ma nature. Il faut que je bouge, que je m’active. C’est plus fort que moi. Oui, oui, vas-y Pepette, mais bientôt tu ne pourras plus bouger.
Samedi 12 avril 2014 Cœur jumeau l’avait prédit. C’est arrivé. Dos complètement bloqué. Chaque mouvement rotatoire pique le bas de la colonne jusqu’au genou. Aïe. Ce mot que je ne prononce jamais (en tout cas, pas tout haut) et qui m’enlève le sourire. Au menu obligé : repos et patch. Et ça m’ennuie de me retrouver couchée dans un divan. J’ai l’impression de perdre mon temps. Et pour moi, le temps est si précieux avec tant de projets plein la tête. Tant pis, je me rends Monseigneur. Je pose l’épée et l’armure et je me couche. A demain.
Dimanche 13 avril 2014 Ouf, le dos est réparé. Bien sûr pas pour escalader le Mont Ventoux d’une traîte. Je ne sais pas pourquoi je prends cet exemple, moi qui ne fais même pas de vélo. Enfin c’est juste pour que vous, les sportifs, compreniez bien la puissance de l’effort. En route pour une séance de shooting bien agréable avec une artiste que nous adorons. Pour ne pas en dire plus aujourd’hui sur le projet, je peux juste vous assurer que ce fût un amalgame de beaux moments et de fou-rires.
Lundi 14 avril 2014 La journée commence par une mauvaise nouvelle. L’épouse d’un ami s’en est allée rejoindre les étoiles. Elle s’est battue comme une lionne. Pour elle, et toutes les autres, je me dois de continuer la bagarre. Putain de saloperie de crabe. Quand auras-tu suffisamment de trophées pour arrêter ton génocide ? Mais qu’est-ce qu’on t’a fait ? On n’a rien demandé. D’ailleurs, avant, on ne pensait jamais à toi. Juste aux travers de ceux qui avaient croisé ta route. Mais nous, jamais nous n’aurions pensé qu’un de ces quatre, on devrait aussi devenir des battantes. Moi, qui ai toujours détesté les armes et tout ce qui va avec, me voilà servie. Je n’ai pas d’arme, je ne sais d’ailleurs pas m’en servir, mais je suis au milieu du champs de bataille, comme une conne. Je n’ai même pas de stratégie. Alors, je me débats au milieu de cette armée d’inconnus qui sont dans mon camp. Ca crée des liens, mais franchement, j’aurais préféré les connaître autrement et ailleurs que sur cet amas de ruines. Chaque matin, je me persuade que je vais gagner la bataille du jour et j’y arrive. Il n’y a qu’un énorme crabe face à nous. Il est immense, fort et fourbe. Un coup de pince par ci, un coup de pince par là, et hop….. une vie en moins. Charogne, tu vas crever un jour, toi aussi et on ne t’épargnera aucune souffrance. Foi de moi. Mais ma grande gueule n’y fera rien, je sais que tu resteras le plus fort…. Jusqu’à ce que les chercheurs qui devraient se dépécher de trouver t’envoie une salve bien ciblée et que tu finisses en charpie sur une plage goudronnée. C’est le meilleur que je te souhaite, sale bête. La rage m’habite et pourtant elle n’est pas salutaire. Debout ma Pepette, avance et continue….
Mercredi 16 avril 2014 Notre petit-fils Loïc nous a bien fait rire par une pensée philosophique du jour. Je vous la livre : c’est quand on a un moustique sur les testicules, qu’on se rend compte que la violence ne sert à rien ! Oh, il l’a certainement entendue quelque part, à l’école ou via son aîné Alex. Les enfants ont souvent des mots simples, évidents mais si rigolos. Ca fait partie des petits cadeaux qu’ils nous offrent. La candeur d’un enfant est une chose qu’on ne devrait jamais perdre. Si nous voyions tous la vie avec la candeur et la simplicité, on serait plus vite satisfait. L’ironie sans la méchanceté, la vérité sans arrière-pensée, jamais l’envie de faire mal, mais juste celle de se rendre un peu intéressant. Comme disait Warhol « You can be hero, just for one day ». Offrir un bon mot, un sourire ne coûte pas grand chose et pourtant, cela fait tellement défaut de nos jours. Si on sourit à quelqu’un dans la rue, il vous regarde avec méfiance. Je le connais ? Certainement que cette bête question le taraude tout au long de sa route. Et bien non. Je ne le connais pas, mais sa bouille m’a donné envie de partager ma joie. J’ai fait quelque chose de mal ? Oufti, j’ai osé sourire à un(e) inconnu(e). Honte à moi. Pour un instant, une seconde, je suis devenue suspecte aux yeux des autres. Coupable d’avoir été moi, tout naturellement. A la longue, ça use. Donc, on se referme et tant pis pour le moment présent qu’on aurait pu partager. Mais, moi, je m’en fiche. Je continue à sourire, à dire ce que je pense et tant pis si ça ne plaît pas. C’est peut-être aussi le privilège de l’âge, qui vous permet d’être agréable ou désagréable quand vous voulez, où vous voulez, avec qui vous voulez. Na. Quand il m’arrive de sortir de ma campagne pour flâner dans les rues d’une ville, je trouve les gens si tristes. On dirait qu’ils ont toutes les misères du monde sur les épaules. Il est vrai que quand on voit ce qu’ils doivent subir quotidiennement, ça n’est pas toujours rigolo. Le bruit, la confusion, l’urgence, la promiscuité, la violence, le mal de vivre, la nostalgie. Ca use à la fin. C’est pourquoi, depuis que je ne travaille plus, je prends un plaisir malsain chaque matin, lovée sous ma couette, à écouter les embarras de circulation. Je sais. Ca n’est pas bien. Je me dis juste que j’ai aussi subi tout cela pendant presque 40 ans et qu’il est temps maintenant de me reposer et d’en sourire. J’ai arrêté la course contre le temps. De toute façon, le temps ne fait que passer, furtivement et rien ne l’arrête…. Tout comme la maladie. Alors, pourquoi essayer de le rattraper en surbookant notre emploi du temps. L’emploi du temps. Quelques mots qui peuvent se transformer en loisir ou en cauchemar. Y-a-t’il un quelconque mode d’emploi pour employer le temps. Utilement, je veux dire. Et pas à attendre dans des files, au guichet, sur la route. Même si on dit que les femmes peuvent faire plusieurs choses en même temps, le temps passe, vite, très vite, trop vite. On loupe le merveilleux moment présent, parce que dans nos têtes, nous sommes déjà dans l’instant d’après. Celui où il faut trouver « l’excuse » à nos retards, à nos malfaçons, à ce qu’on n’a pas pu faire ou dire. On s’excuse tout le temps. Mais pourquoi bon dieu ? Parce que quelqu’un, assis sur le fauteuil en cuir dans le grand bureau, a décidé qu’il y aurait une façon de « bien » faire les choses, d’être ponctuel, malgré les aléas du temps. Et ainsi, on passe notre vie à courir après le temps pour être la personne de confiance pour les autres. Mais pour nous, nous restons des insatisfaits. N’attendez pas d’avoir le temps. Il sera peut-être trop tard, car, du temps, vous n’en aurez plus ou vous ne pourrez plus l’utiliser parce que tous ces moments d’urgence l’auront bouffé et vous vous retrouverez impuissants face au temps. Celui qui parsème nos visages de rides et autres méfaits naturels de ce fameux temps. Certains, pour éviter ce reflet dans leur miroir, se plaisent à faire du bistouri un allié tellement chimérique. Pour une fois, il y a une justice. Quand j’avais 15 ans, un type de 40 ans était, à mes yeux, un vieillard. Aujourd’hui, quand on m’annonce le décès d’un ami de 70 ans, je me dis qu’il est parti trop tôt et que c’est jeune pour mourir. Tout est relatif, voyez-vous. Tout dépend d’où nous nous trouvons et de comment nous regardons les choses. C’est l’éternelle histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein. Optimiste ? Pessimiste ? Mais quoique l’on fasse, on reste tributaire de ce tic-tac éternel qui résonne dans nos oreilles. Tic tac tic tac tic tac….. jusqu’au jour du dernier tac, le moment fatidique où on dit de nous, pudiquement, que nous sommes partis rejoindre les étoiles. Tu parles. Je m’en fiche moi d’aller en exploration intersidérale. Ce que je préfère, c’est vivre. Pleinement. Intensément. Eternellement, oserais-je dire. Pourrait-on imaginer un être éternel ? Ca devrait être jouissif d’être une mémé rabougrie qui regarderait le monde du haut de sa sagesse, qui aurait une réponse à 90% des questions que se posent ceux qui courent, qui ne devrait plus s’inquiéter de la maladie, de la mort. Qui sait qu’elle est là pour toujours. Toujours, ce mot qui dit bien ce qu’il veut dire tout les jours, sans aucune fin. Mais on finirait par s’emmerder. Parce que quand on a fait le tour de la question, on n’a plus rien à découvrir. Quoique. Finalement, chez l’homme, ce qui est parfait est qu’on ne sait jamais rien sur rien et qu’on peut apprendre chaque jour de tout le monde, sur tous les sujets. Vous voyez qu’on peut passer du rien à tout ou de tout à rien. Alors, pourquoi s’en faire ? Pourquoi étaler notre culture comme de la confiture sur une tartine ? Tout le monde se fout de ce que vous savez ou prétendez savoir, de ce que vous valez ou prétendez être. La seule personne qui doit être sensible est vous-même. Si vous êtes content de vous, vous avez gagné contre ce fameux temps. N’oubliez jamais que le miroir (donc votre propre reflet) ne rit jamais quand vous pleurez. Tout au plus, il peut vous renvoyer cette image si triste qu’elle vous donne envie de ne plus la voir, donc de sourire. Allez, là-dessus, bonne journée.
Jeudi 17 avril 2014 Aujourd’hui, je vous offre une minute de silence. Rien à dire. Si ce n’est aurevoir à Mumu, une battante qui n’est pas parvenue à infiltrer l’ennemi, mais qui nous a montré la voie du camps adverse. Pour une fois, je ne dirai rien. Regardez la page blanche et méditez ce moment présent.
Lundi 21 avril 2014 Les cloches sont reparties vers…. Oui, au fond, où retournent-elles finalement ? Encore une question existentielle, mais sans réponse. Pluie d’œufs, de lapins, de poules en chocolat. Mais, pour moi, pas de pancréas, pas de chocolat. C’est un peu difficile pour une fan de ce délicieux mets comme je l’étais auparavant. Mais, ça n’est quand même pas le plus difficile à gérer. Le décès de Mumu et d’autres me laissent comme un goût d’urgence. J’ai un peu de mal à gérer tout cela, même si je ne devrais pas prendre sur moi, mais c’est chaque fois, un rappel au fameux moment présent. Je ne suis qu’un être humain après tout avec ses hauts et ses bas. Mais, foi de moi, je vais me ressaisir. Le soleil brille comme un malade dehors et la température remonte. Le printemps est bien installé. Nous avons fait la connaissance de notre nouveau voisin, Michel. Un gars super sympa et qui, de surcroît, aime la musique. Je m’aperçois que, plus la vie avance, plus j’aime les gens qui me font du bien. Des gens souriants, qui ne se posent pas de questions, qui ne veulent pas paraître à tout prix et qui sont sincères. Ce tri salutaire nous permet d’avancer bien entourés. Hier soir encore, nous étions invités autour d’une table conviviale avec des personnes qui ont des vrais projets, qui s’auto-motivent et qui croient en eux. Qu’est-ce que ça fait du bien. Surtout quand ils disent qu’ils ne le font pas pour la gloire, mais juste pour le plaisir de réaliser un rêve qui doit aboutir. Maintenant, si la gloire arrive, ils ne cracheront pas dessus, mais le but premier du projet n’est pas de monter sur le premier échelon et c’est ça qui est beau. On ne peut que soutenir une telle initiative. Ca contraste un peu avec tous ceux qu’on rencontre sur les marchés, qui nous serrent la pogne (alors qu’auparavant, ils ne nous regardaient même pas), qui nous demande si tout va bien et si nous n’aurions pas besoin d’un coup de pouce. Parce que, bien entendu, ils sont là, ils nous le rappellent. La question « tout va bien ? » m’interpelle et me fait un peu sourire. Mais, bien sûr, que tout roule mon pote. Ca ne se voit pas ? Le caddy me coûte trois fois plus cher qu’avant l’euro, je respire un air de plus en plus pollué et j’arrive à l’âge de la retraite et je devrai fonctionner avec quatre fois moins que mon salaire. Que demande le peuple ? On a une pêche d’enfer. J’oubliais aussi de te dire, mon ami serre-la-pince-au-marché, que les médicaments coûtent de plus en plus cher et que tes amis me refusent la participation aux soins dentaires parce que je ne sais pas te montrer, preuve à l’appui, que mes dents étaient saines avant qu’on ne m’injecte toutes ces saloperies de produits chimiques. En plus, ma vue baisse de plus en plus, j’ai mal au bras droit, mais ça n’est pas inclus dans les remboursements prévus à cet effet. Tu veux que j’allonge la liste ? Alors, ta question de savoir si tout va bien…. ne te poses pas la question de savoir où je me la mets ! Est-ce que je te demande si le chantier de ta gare à x millions d’euros est en bonne voie ? Je m’en fous. Parce qu’avec ce pognon, tu permettrais à des milliers de ménages de vivre juste décemment, c’est-à-dire au seuil de la pauvreté et pas en dessous. Je sais, je suis un peu ordurière, mais il y a encore des attitudes qui me sortent de mes gongs. Alors, je les évite. Le pire, c’est que la plupart, garde cette attitude même face à leurs amis et là, c’est juste insupportable. Et puis, toutes ces discussions, ces promesses qui ne seront jamais tenues parce que nous savons bien qu’à force d’avoir dilapidé l’argent du citoyen, les caisses sont vides. Alors, ayes le courage de me dire que tu voudrais bien mais que tu ne pourras pas le faire, sauf au détriment de pauvres citoyens qui devront une fois de plus mettre la main au porte-feuille qui est déjà bien léger. Mais je ne vais pas m’énerver, bien que ça me fasse du bien de le dire. Quand je tiens ces propos à mon cœur jumeau, il me dit qu’Angela Davis n’est décidément pas outre-tombe et que je me fais du mal pour rien. Du mal ? non non, je m’exprime, c’est tout. Cet après-midi, un petit coucou à ma maman de cœur pour faire la cloche. Toujours du bonheur à l’état pur. Elle me fait du bien la maman de mon cœur jumeau. Que j’aimerais lui ressembler à 89 ans. Mais ça, c’est une autre histoire.
Mardi 22 avril 2014 Ce matin, une information sportive m’a interpellé. Vous lisez bien, une info sports. Ca ne me ressemble pas trop, mais vous comprendrez en lisant ce qui suit. Un marathon quelque part en Espagne. Un champion espagnol tient la seconde place depuis le début de la course. En tête, un athlète kenyan. Jusque là, ça n’est jamais qu’une course à pied comme les autres. L’athlète espagnol, si il gagne ce marathon, aura accès à je ne sais quel grade dans je ne sais quelle qualification, donc il joue gros. Tout est relatif, vous me comprendrez, mais pour lui, il joue gros. La ligne d’arrivée est en vue à quelques centaines de mètres. Il se rend compte qu’il devra se contenter d’arriver en deuxième position. Mais, le kenya interprète mal un signal et pense qu’il a passé la ligne d’arrivée. Il ralentit les bras levés au ciel, pensant qu’il était le vainqueur. A cet instant, il suffisait à l’espagnol de continuer sur sa lancée pour terminer en tête et donc accéder à ce à quoi il aspire depuis longtemps. C’est là que l’histoire m’a émue. Plutôt que de profiter de l’erreur de son concurrent, il reste derrière lui et lui fait des signes pour lui expliquer que la ligne d’arrivée est un peu plus loin. Et le kényan a gagné sa victoire bien méritée. Au journaliste espagnol qui lui posait LA question en or : mais pourquoi n’en avez-vous pas profité ? Et sa réponse me réconcilie avec le genre humain : ma plus belle victoire est d’avoir été honnête avec moi-même. Je ne méritais pas cette victoire. Gagner au dépens de l’incompréhension de mon concurrent m’aurait empêché de me regarder chaque matin dans la glace. Chapeau mon gars. Tu as tout compris. La victoire est celle que nous apprécions à sa juste valeur. Celle qui nous rend plus beau, plus fort quelques soient les circonstances. Vous connaissez mon engouement légendaire pour le sport où on écraserait un concurrent pour arriver premier, mais ici j’avoue qu’il m’a bluffé. Un véritable exemple à suivre, une histoire à partager, afin que les « autres », ceux qui se trouvent moches dans le miroir du matin, comprennent qu’ils n’épatent personne, qu’il n’y a pas victoire sans peine et que tout se mérite, mais surtout qu’il faut savoir reconnaître l’être plus fort que soi, sans avoir l’impression de la honte ou de la défaite. La défaite n’existe que pour ceux qui ont lâché leurs rêves essentiels.
Jeudi 25 avril 2014 Non, je n’ai pas la lubie, il y a bien une perruche verte dans l’arbre. Ben mince alors. Je me frotte les yeux et c’est bien réel. Mais qu’est-ce qu’elle fout là ? Après info, il paraît qu’elles sont des centaines à s’être reproduites en liberté. Avec le soleil, on se croirait sous les tropiques. Hier, tournage video pour un clip à venir d’un ami musicien, qui a un super beau projet. Que ça fait du bien de passer quelques heures en compagnie de personnes saines, calmes, qui oeuvrent pour un même projet, sans prétention, sans cris…. Que du bonheur. J’ai fait les photos du making-of et j’avais l’inspiration. Etait-ce la musique ou les gens présents ? Mais c’est digne d’un shooting et tout ça avec un petit Sony. Pour une fois, je suis fière de moi.
Vendredi 25 avril 2014 Il est des rencontres qui ne laissent pas indifférent. Ce fût le cas aujourd’hui. Je me suis prêtée à un shooting pour le projet Rhizome. Il s’agit d’une photographe qui, interpellée par les ségrégations et censures de toutes sortes, a eu une idée géniale. Un personnage en femme, le même personnage en homme (et vice-versa suivant le sexe du sujet). C’est vraiment génial et je suis fière d’être la première amazone à passer devant son objectif. Avant le shooting, nous avons échangé et le temps a passé pour mieux se livrer avant le clic. Belle personne, comme on aimerait en rencontrer plus souvent. Je me réjouis de voir le résultat. Il m’a déjà étonné dans le miroir, donc ça devrait le faire.
Samedi 26 avril 2014 En mode Aubert pour un showcase à fixer sur carte-mémoire. Super moment. Nous étions présents dès les balances. J’avais l’impression qu’il jouait pour moi toute seule. J’ai toujours aimé cet artiste. Sa mise en musique des textes de Michel Houellebecq est un petit bijou. Ma préférée est « novembre », une chanson à fleur de peau. Un de mes meilleurs souvenirs de shooting.
Lundi 28 avril 2014 Je n’aime pas les dentistes. Et pourtant, à midi, il va s’occuper de ma boîte à dents. J’ai toujours eu une trouille bleu de cet homme en blouse blanche. Pourtant, j’en ai passé des examens difficiles, mais lui, moins je le vois, mieux je me porte. Ceci dit, il est délicat, donc je m’en fait pour rien. J’ai entendu une phrase qui m’a bien fait rigoler : ronfler, c’est dormir tout haut. Tellement vrai. J’ai vu le résultat de la séance photo pour le projet Rhizome dont je vous parlais plus haut. Bluffant. En mec, j’ai juste l’air d’un maffieux. Pour une méditerranéenne, c’est plutôt rassurant.
Mardi 29 avril 2014 Aujourd’hui, j’ai poney. Mais non, je vais à l’hôpital. Juste pour recevoir ma dose tri-hebdomadaire. Ma came, quoi. Par contre, la prochaine fois, c’est batterie d’examens avec son cortège d’attente et de petite angoisse. Je me sens bien, mais, je ne vendrai la peau de l’ours qu’après l’avoir abattu. Vous comprendrez que c’est juste une image, moi qui ne tuerais même pas une mouche. Le nouveau département d’onco a été agrandi et modernisé. Pas mal. Mais quand je suis entrée dans le local de réception, j’ai sursauté. Tellement de monde, jamais vu ça. Un peu comme une station de métro aux heures de pointe. Je tire le numéro 113 et on sert le 89, un peu comme à la boucherie. Vous me mettrez une bonne dose d’Herceptine et un café, SVP. Nondidju, il serait temps que les chercheurs trouvent, parce qu’à cette allure, ce n’est plus un département mais un hôpital entier qu’il faudra. Les blouses blanches s’ébrouent dans tous les coins, n’ayant même pas le temps d’aller faire pipi. C’est presqu’inhumain. Non, pas presque. C’est de l’abattage. Il me semble que de séances en séances, il y a toujours plus de membres à notre communauté de malades. On se passerait bien de faire partie de cette caste, mais il faut bien se rendre compte à l’évidence, elle grossit à vue d’œil. Mais il ne faut pas se laisser abattre. Une infirmière, une nouvelle, me demande si je dois encore recevoir beaucoup de doses. Ben, comment t’expliquer ? C’est une maladie chronique. Ca signifie que c’est jusqu’à la fin et que je ne suis pas pressée de terminer le traitement, si tu vois ce que je veux dire. Comme ils ont besoin de fauteuils, ça a duré 2 heures et retour à la maison. Il faut toujours voir le côté positif de la chose.
Et bien voici un mois qui se termine en beauté, fait de beaux souvenirs, de belles rencontres et d’amour. Que demander de plus ?
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Mise à jour le Samedi, 03 Mai 2014 10:48 |