Charlotte Polis
Écrit par Albert Moxhet   
Vendredi, 20 Février 2015 21:08

Samedi Coup de cœur d’Albert Moxhet

Généralement, on ne parle pas de l’âge des dames. Dans le cas de Charlotte Polis, c’est différent : elle indique elle-même, dans L’Album de Télévesdre, qu’elle vient d’avoir 89 ans et que, depuis cinq ans, elle publie chaque année un roman. Coup d’œil sur les deux derniers parus.

 
Bien connue dans les cercles associatifs et culturels verviétois, Charlotte Polis est une de ces personnes qui portent sur leur parcours de vie ce regard lucide et plein d’humour qui conserve à l’esprit une alacrité où se combinent sagesse et humanité. Il n’est pas anodin de noter que nos Hautes Fagnes furent le décor des débuts littéraires de Charlotte Polis, dont l’époux fut le commandant du camp d’Elsenborn. Dans Un amour absolu, l’intrigue romanesque s’inscrit dans un environnement fagnard profondément ressenti et exprimé avec la sensibilité d’un peintre. Avec Maiky, le roman d’une chevrette, on est au cœur d’un étonnant document : le journal des relations véritablement amicales qui se sont établies entre une chevrette des Hautes Fagnes et l’auteure et son mari.

Publiés respectivement en 2013 et 2014 aux Éditions Noctambules, Au nom de l’amitié et Les non-dits meurtriers sont deux romans qui mettent en scène des personnages appartenant à la grande bourgeoisie aisée où le champagne n’est jamais loin, ne serait-ce qu’en mignonnettes. Le premier de ces ouvrages offre une analyse toute en nuances de l’amitié de deux veuves d’une soixantaine d’années que viennent troubler la brusque survenance d’un séducteur pour le moins goujat, puis aussi l’approche discrète d’un homme d’une élégance morale indiscutable.

Avec la hardiesse d’un roman policier, la première page des Non-dits meurtriers montre les cadavres du triangle classique : le mari, la femme, l’amant. Comment en est-on arrivé là, c’est la trame du récit dont le pivot est Tante Cathie, une alerte octogénaire dont le rôle s’apparente à celui du chœur dans la tragédie grecque mais aussi à celui du destin. L’observation de la vie du couple qui se sclérose avec le temps donne lieu, ici également, à une analyse finement commentée des sentiments et de l’usure des passions.

La lecture de ces deux romans permet de dégager des constantes sous la plume de Charlotte Polis, cette plume qui est d’une souplesse classique relevant au passage les quelques détails qui, dans une description, font goûter un paysage ou déceler un sentiment. La romancière est parfaitement maître du monde qu’elle construit, n’hésitant pas à rassembler des coïncidences en un écheveau qui sert bien la mécanique du récit. Dans le même souci de cohérence, les personnages relèvent d’un même milieu social, avec, bien évidemment, toute la variété qu’apportent les particularités individuelles. Au travers d’intrigues bien documentées et jamais vulgaires, le couple, l’amour, la passion permettent des développements où transparaît le goût de l’auteure pour la philosophie et les lettres classiques. Et, ce qui ne gâte rien, c’est que, sur ces réflexions intégrées dans l’action, on sent flotter le sourire malicieux de cette charmante dame heureuse d’écrire.

 


 

[Références : - Charlotte POLIS,  Au nom de l’amitié, Verviers, Éditions Noctambules, 2013. ISBN : 978-2-930616-19-3

                     - Charlotte POLIS, Les non-dits meurtriers, Verviers, Éditions Noctambules, 2014. ISBN : 978-2-930616-28-5] 

Les portraits illustrant ce Samedi Coup de cœur sont extraits de l’émission L’Album que Télévesdre à consacrée à Charlotte Polis le 26 janvier 2015. http://www.televesdre.eu/www/_l_album_charlotte_polis_ecrivaine_diffuse_le_26_01_2015_-86208-999-138.html     

Mise à jour le Vendredi, 20 Février 2015 21:32