| Samedi Coup de cœur d’Albert Moxhet Placer le carnaval hors du temps pour mieux comprendre Le temps du carnaval et le carnaval dans le temps, c’est en quelque sorte le propos des organisateurs de cette exposition qui cerne la très ancienne tradition du Cwarmê de Malmedy. Ouvrir cette exposition en automne permet de saisir calmement tous les tenants et aboutissants de ces quatre jours festifs, en dehors de l’effervescence des préparatifs et des quatre jeudis-gras précédant le carnaval proprement dit.
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Le parcours du visiteur englobe le cloître et, bien évidemment, le Musée du Carnaval qui y est accolé en permanence, mais il se poursuit sous les combles avec force couleurs et des documents audiovisuels bien menés. Si les premières mentions écrites du carnaval de Malmedy remontent à 1459, les documents, photos et costumes présentés montrent que, tout en conservant le même esprit, bien des choses ont évolué au cours des siècles ou même des décennies, tout simplement. N’en prenons que deux exemples. Le vèheû, tout d’abord, c’est-à-dire le putois, dont on retrouve l’ancêtre chez les mendiants infirmes des tableaux de Bruegel l’Ancien et qui accrochaient des queues de martre ou de putois sur leurs nippes. | |
En Ardenne, il est devenu par la suite le prédateur loqueteux poursuivi par la Jeunesse, qu’il risquait d’introduire dans les maisons où il se réfugiait si on ne lui donnait pas rapidement des victuailles. Aujourd’hui, le vèheû, toujours armé d’une vessie de porc, en est venu à porter un luxueux costume aux couleurs pimpantes. Il en va de même pour l’incontournable haguète qui, au départ, encagoulée sous la bure, a peu à peu choisi de riches tissus, un bicorne emplumé, et n’a abandonné la cagoule que dans les années 1920. Son balai primitif a fait place, quant à lui, comme chacun sait, au célèbre hape-tchâr pour taquiner les spectateurs. | On a, là aussi, un élément caractéristique du carnaval wallon. Outre que, du discours du Trouv’lê jusqu’aux savoureux rôles du lundi, tout s’y passe en wallon, il s’agit d’une manifestation où, plutôt que de défiler sur des chars, si originaux soient-ils, les participants interviennent sans cesse dans la foule, amenant les spectateurs à entrer dans le jeu de façon drôle et active. Et les quinze masques traditionnels qui se répartissent toute cette animation sont en quelque sorte le résumé ou la synthèse de l’histoire, des coutumes et des légendes de la ville. Que ce soient les Sotês, les bicornes français de la Grosse Police ou de la Haguète, l’aigle bicéphale du Saint-Empire que portent celle-ci et le Trouv’lê, et puis aussi les Boldjîs et les Cwapîs de la vie quotidienne, pour ne citer qu’eux, tous attestent qu’à Malmedy, le Cwarmê, c’est la vie, une vie regardée pour quatre jours par l’autre bout de la lorgnette.
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[Au Malmundarium, Monastère de Malmedy, place du Châtelet, 4960, Malmedy, jusqu’au 11 décembre, 10-18h (17h à partir de novembre), fermé le lundi, excepté vacances scolaires] |