Le vitrail monumental en Wallonie
Écrit par Albert Moxhet   
Mardi, 27 Décembre 2011 00:08

 Samedi Coup de cœur d’Albert Moxhet 

Bien qu’y étant abondant, le vitrail reste un art mal connu chez nous. Les actes d’un colloque international organisé à Liège en novembre dernier sur les créations réalisées de 1980 à 2010 dans le domaine du vitrail monumental viennent de paraître en un beau volume très largement illustré. 

Parmi une bonne vingtaine de contributions internationales qui abordent de multiples aspects de l’art du vitrail, tantôt à propos d’un courant ou d’une tendance, tantôt à propos d’une réalisation particulière, d’un artiste ou encore de techniques nouvelles, on relèvera tout spécialement l’article consacré par Isabelle Lecocq et Yvette Vanden Bemden au vitrail monumental en Région Wallonne.

Avec un sens très sûr de la synthèse, les auteures y définissent les « difficultés qui ont inhibé le développement du vitrail en Wallonie », notamment l’absence de mécénat ou de large aide publique à la création, la crainte des maîtres verriers de voir des plasticiens pénétrer dans « leur » domaine, le manque d’audace qui empêche d’accueillir des créations contemporaines dans des édifices anciens au lieu d’y restaurer des vitreries quelconques, la commande sur un marché local restreint, le manque d’un enseignement supérieur en art monumental.

À bien y regarder, on est confronté ici à des manques que ne connaissent résolument pas la plupart des autres pays d’Europe, comme le confirment plusieurs textes publiés dans cet ouvrage.

 

 Et pourtant nous avons dans la région des artistes verriers – qu’ils soient peintres ou plasticiens – dont la renommée et les créations dépassent largement nos frontières. Il suffit, pour s’en convaincre, de citer les noms de Raoul Ubac, Charles Counhaye, André Blank, Jean Rets, Nihat Demir ou Jean-Marie Geron. Verviétois, Docteur en Sorbonne pour une thèse sur le rôle des peintres français dans le renouveau de vitrail après la Seconde Guerre mondiale, ce dernier a été professeur de vitrail à l’Académie de Namur.

En 1989, deux de ses élèves, Sandra de Paoli et Sonia Milicant, et lui-même furent, avec une Brugeoise et un Anversois, les seuls Belges retenus, sur 323 candidatures émanant de quinze nations, pour la 2e Exposition internationale du Vitrail à Chartres. Indépendamment de toutes les autres questions, il reste une équivoque sur le rôle du vitrail – plus exactement : des vitraux – dans un édifice. Pour certains, un vitrail, c’est un tableau de verre qui illustre une fenêtre comme une toile orne un mur.

C’est oublier que le vitrail fait partie d’un ensemble architectural dans lequel il doit s’intégrer pour une longue durée, car il est « immobilier par destination ». Cette intégration explique pourquoi l’art moderne peut aussi cohabiter harmonieusement avec des édifices anciens. Cela demande une inspiration sereine et approfondie de la part de l’artiste, ainsi qu’une certaine modestie que partagera également l’artisan-verrier, dont la technique s’imbibe de la création du peintre sans s’imposer pour elle-même. 

En vous promenant dans nos régions – et il n’est pas nécessaire d’aller très loin – contemplez les vitraux des petites chapelles comme des grands édifices. Gardez un œil critique, vous vous rendrez compte que la technique n’est rien sans l’art, parce que le vitrail se construit avec la lumière. 

 

[Référence : Le Vitrail monumental. Créations de 1980 à 2010, Liège, Commission royale des Monuments, Sites et Fouilles, Dossier 14, 2011. ISBN : 978-2-9600935-2-0]   

Mise à jour le Mercredi, 28 Décembre 2011 16:29