Hamm et Haas : Qui c’est ça ? |
Écrit par Jacques Wynants | ||
Mercredi, 26 Janvier 2011 18:11 | ||
Le Jour du 15 décembre 1926, dans les avis de naturalisation, signale la demande faite pour obtenir la naturalisation ordinaire par Hamm Léonard, coiffeur, ,fils de Henri Joseph et de Peetz Barbara, habitant Verviers rue de France 34 depuis 1894 (rue de France ou rue du Prince ? Les graphies sont proches si on écrit à la main). Mais qui est ce Léon Hamm ? Le Jour des 7-8.6.1958 nous fournit sa nécrologie. Il est mort rue du Prince, à son domicile. Il était trésorier de l’union communale socialiste, membre du comité local de l’Union Coopérative et membre fondateur de la Jeune Garde Socialiste. En janvier 1957, il avait succédé à Georges-Valère Lejeune comme administrateur de la CAP (ancêtre du CPAS). Très bien, mais qu’a-t-il de spécial, ce Léonard Hamm ? Pour nous, aujourd’hui, ses liens avec Haas et une affaire rapidement qualifiée d’espionnage en Allemagne nazie. Parlons maintenant de Haas. Marié, père d’un enfant d’environ 12 ans, secrétaire du syndicat textile d’Aix-la-Chapelle, ce social-démocrate s’est enfui d’Allemagne en juillet 1933. La police nazie avait en effet perquisitionné son bureau, emporté des dossiers et, en son absence, arrêté son épouse. Haas s’est alors réfugié à Verviers, chez Hamm, qu’il connaissait depuis longtemps. Deux agents provocateurs vinrent le relancer ici en ville. Haas, inquiet pour son épouse et peut-être son vieux père, demande à son hôte d’aller à Aix, porteur d’une lettre familiale, et de se renseigner. Hamm part le 27 juillet mais, à peine en gare d’Aix, il est intercepté par la police qui le maintient en état d’arrestation comme agitateur communiste. Après 24 jours de prison, après un interrogatoire musclé, après de vaines démarches du consul de Belgique, M. Dargent, un Verviétois, Hamm est finalement expulsé du Reich et rentre à Verviers. Ainsi, en août 1933, les lecteurs du Jour connaissent déjà l’ambiance qui règne en Allemagne et les pratiques de la police. Mais ce n’est pas tout. Quelques mois plus tard, en mars 1934, c’est à Verviers la mémorable grève du textile. Et voilà que, devant les établissements Simonis, de bonnes âmes du service d’ordre privé de la firme remarquent un quidam en train de prendre des photos de la foule et des installations. Le photographe, c’était Haas. Curieux comme la police peut arriver vite, en certains cas, quand elle est mandée par des personnes qui comptent ! Appréhendé, interrogé à l’hôtel de ville, Haas se voit saisir son appareil tandis que son identité est scrupuleusement vérifiée. Que faisait-il là ? Il dira qu’il allait essayer un appareil photographique et qu’il n’avait d’ailleurs pris aucune photo. Pas très clair quand même. Et voilà un réfugié qui donne l’impression de se lancer en Belgique dans des « activités politiques », ce qui lui est évidemment interdit. La Sûreté enquête. L’affaire se dégonfle, mais Haas aura eu chaud. Qui était-il ? Né en 1892, social-démocrate et syndicaliste, il s’est réfugié à Verviers avec son fils. L’épouse sera condamnée par le Volksgericht. Avant guerre, dès 1933, il tient permanence à la maison syndicale de Verviers où il aide les fugitifs. Indicateur de la Sûreté belge, il a pourtant été arrêté comme suspect le 10 mai 1940 et transféré à l’ignoble camp de Gurs, d’où il s’évadera avec son fils en mars 1941, après avoir acheté des gardiens. Il aboutira aux USA. Hamm et Haas, curieux destins quand même, non ? Sources : Le Jour, 9.6.1910, 1-2.5.1919, 15.12.1926, 8.8.1933 ; 21.8.1933, 4.3.1934, 8.6.1958 CEGES, Documents Rudi Van Doorslaer Jef RENS, Rencontres avec le siècle. Une vie au service de la justice sociale, Paris-Gembloux, 1987, p. 107-109. |
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Mise à jour le Mercredi, 26 Janvier 2011 18:15 |