La Grand-Poste de Verviers
Écrit par Best of Verviers   
Dimanche, 26 Septembre 2010 08:29
Dès la fin du 18e siècle, la ville de Verviers est devenue un centre important du travail de la laine. Le développement urbain y est considérable. Verviers est devenue une ville prospère et riche, ce qui lui vaut dès cette période et pour le siècle qui suit la construction de nombreux bâtiments prestigieux comme l'hôtel de ville, Place du Marché, le Palais de Justice, l'église Saint-Remacle,...
 
Dès 1882 au vu du développement du trafic postal, du télégraphe et du téléphone, la construction d'un vaste hôtel des Postes devenait une nécessité. La construction débutera en 1904 pour s’achever en 1909.

Le bâtiment est ouvert au public en septembre 1910.
C'est l’ingénieur architecte gantois Alphonse van Houtte qui fut chargé des plans et de sa réalisation. On lui doit également les Postes de Spa, de Louvain, de Nieuwport,...
Il assuma la construction de ce nouvel édifice qui rappelle le style des hôtels de ville flamands avec ses perrons, ses tours,...

Le travail des artisans fut remarquable et la pierre abondamment utilisée dans les façades.
La pierre bleue pour tous les éléments taillés, le grès pour les éléments maçonnés, le grès vert de la Gileppe pour les soubassements et enfin, le grès rose d’Andenne pour les élévations.

 

Le bâtiment compte deux tours. La petite tour ronde, mesure une cinquantaine de mètres. Son sommet est de forme octogonale.
Elle est percée d'ouvertures de chaque côté. Cette tour abritait notamment la cage d'escalier qui desservait l'habitation du percepteur.

 

La grande tour quant à elle, toujours de plan octogonal, monte à plus de 80 mètres. Elle est couronnée d'une haute flèche métallique couverte d'ardoises.

 

Ce bâtiment est donc le reflet de son époque qui voulait recréer " en plus grand, en plus beau et en plus vrai " les styles architecturaux du passé, gothique ou renaissant.
On notera le perron d’entrée où se dressent, majestueux, deux lions héraldiques aux armoiries de la Ville de Verviers et de la Province de Liège.
Au départ, la poste occupait le rez-de-chaussée, et les télégraphes-téléphones les étages.
L’accueil du public se faisait au centre du bâtiment dans la salle des pas perdus où étaient disposés les guichets des différents services.
L’aile droite abritait les Postes avec au rez-de-chaussée la salle de tri et la salle des facteurs.

 

 

Outre l'aspect esthétique, les deux tours avaient une raison d’être qui était d’ordre technique. Des gravures nous rappellent qu’à ses origines, les fils reliant l’abonné au central étaient aériens. Ils descendaient du sommet de la grande tour de dispersion vers les maisons des abonnés.
Le service des marchandises disposait quant à lui de l’annexe rue Coronmeuse à l’arrière du bâtiment.
C'est vers la fin des années 50 que les Téléphones s’installèrent en face dans un bâtiment moderne dirigé par les services de la RTT (Régie des télégraphes et téléphones).

Début des années 70, sa démolition était prévue pour créer un accès au fameux projet de viaduc. Malgré l’abandon de ce projet suite à la mobilisation des Verviétois, la démolition resta inscrite au plan particulier d’aménagement et la décision du déménagement de la Poste dans un nouvel immeuble rue Collège fut effective en 1983.
A partir de ce moment, la Grand’Poste ne fut plus entretenue par son propriétaire, la Régie des Bâtiments, et commença à lentement se dégrader principalement au niveau des toitures.
Les derniers occupants quittèrent le bâtiment en 1987.
La Régie des bâtiments dut entreprendre d’impressionnants travaux de sécurisation en démontant les pinacles de la grande tour.
Verviers envisage à nouveau sa démolition.

 

 

C'est sans compter sur ces quelques verviétois passionnés qui mobilisèrent l'opinion par des actions concrètes ou symboliques et continuèrent à rêver à sa rénovation, conscients qu'ils étaient de l'importance de la sauvegarde de cet imposant bâtiment pour Verviers.
En janvier 1987, deux conseillers communaux Verviétois, André Weerts et Guy Magnée, lancèrent un plaidoyer pour sauvegarder la Grand’Poste.
« On peut dire que ce dossier empoisonna le quotidien du pouvoir communal grâce à l’action d’Avenir et Sauvegarde des Raines (ASR), animé par Pierre Bricteux, Jean-Noël Crickboom et Pol Noël, qui, à partir de février 1987 n’eurent de cesse de mobiliser l’opinion publique et de remettre constamment dans l’actualité la nécessité de sauvegarder la Grand’Poste.
Le combat d’ASR ne fut pas simple car il fallait convaincre les Verviétois de l’intérêt architectural d’un monument perçu comme très écrasant et très froid. Il fallait faire comprendre que cet immeuble était essentiel dans le paysage urbain. Mais pour ASR, le combat pour la Grand Poste était aussi un combat d’avenir, celui de la revitalisation de la ville.
En ne s’y impliquant pas, les politiciens se décrédibilisaient et décrédibilisaient tous les efforts entrepris dans ce sens.
Certains éditorialistes de la presse Verviétoise, comme Thierry Degives du Jour-le Courrier, souligneront cet aspect des choses.
Leur rôle fut essentiel dans le sauvetage de la Grande Poste.
Le 7 août 1989, la détermination des Verviétois fut récompensée.
Le ministre Feaux signe l’arrêté de classement et met un terme provisoire aux velléités de démolition. » souligne Jean-Pol Godefroid dans son histoire de la Grand-Poste(1).

En août 1996, la société DEMETEX composée de Jean-Pol Godefroid, Fabien Deroanne rejoints plus tard par Frans Farine devient le nouveau propriétaire de la Grand’Poste.
Freddy Joris, à l'époque chef de cabinet du Ministre Collignon, est depuis des années un ardent défenseur de la Grand-Poste. Le soutien politique sera donc tout d'abord trouvé au niveau régional (Monuments et sites)

En mars 2002, suite notamment au décès de l'actionnaire financier Frans Farine, Jean-Pol Godefroid reprend les parts sociales de Demetex et les engagements de celle-ci. « Il prend le risque de perdre tout l'acquit depuis 1983, année où il est devenu indépendant, tous ses avoirs sont réinvestis dans le projet.
Une aventure complètement folle, des risques inconsidérés, penseront certains... seule une poignée de personnes y croient et l'aideront jusqu'au bout. », explique encore Jean-Pol Godefroid sur sa page dédiée à la Grand-Poste. (1)

Près de 9.000.000 € sont a trouver pour réaliser l'opération.
En janvier 2003, les parts sociales de Demetex sont reprises par la Compagnie Immobilière de Wallonie. La Grand-Poste est sauvée !

 

 
Aujourd'hui, on peut admirer ce bâtiment dans toute sa splendeur grâce aux travaux de restauration réalisés sous l'égide du bureau d'architectes Giovannelli-Lejeune.
Depuis le 1er janvier 2005, le FOREM a quitté la rue Pisseroule et s'est installé sur près de 5800 m² dans ce qu'il faut appeler désormais, l'ancienne Grand-Poste.

 

Sources:

www.jpgodefroid.be/histoireposte.pdf (1)

http://mrw.wallonie.be/dgatlp/dgatlp/Pages/patrimoine/ce/RW/aJP99/99lie048.html

http://users.skynet.be/verviers-en-projets/La%20grand%27poste.htm

Thomas Lambiet, historien, lors de sa visite des journées du Patrimoine en septembre 2010



 

 

Mise à jour le Mercredi, 09 Mai 2012 19:29