Didier Comès, l'encrage ardennais
Écrit par Albert Moxhet   
Vendredi, 03 Juin 2016 23:53

Samedi Coup de cœur d’Albert Moxhet

La région verviétoise est depuis longtemps une véritable pépinière de créateurs de  bandes dessinées. Le récent décès de René Hausman, dont le dernier album était un hommage au pionnier que fut Raymond Macherot, ferme symboliquement une boucle. Simultanément, s’ouvrait au Musée en Piconrue, à Bastogne, une remarquable exposition consacrée à Didier Comès.

 
Né à Sourbrodt et Theutois d’adoption, Didier Comès (1942-2013) était aussi l’un des plus grands créateurs belges dans le domaine de la bande dessinée, où la formule du roman graphique lui a valu une réputation internationale. À son décès, son frère et ses sœurs n’ont pas voulu que soit dispersé l’ensemble des travaux et objets qu’il laissait, c’est pourquoi ils firent don de son œuvre à la Fondation Roi Baudouin, laquelle en confia le dépôt au Musée en Piconrue, avec mission de le mettre en valeur.

 


 

Il s’agit là d’un choix judicieux, puisque ce musée se consacre à l’ethnologie, aux légendes, à l’art religieux et aux croyances populaires en Ardenne et Luxembourg et que les albums créés par Didier Comès fourmillent d’éléments qui relèvent, directement ou non, de l’ethnologie ardennaise et de ses origines. Le propos du Musée et de la Fondation  était de mettre sur pied une grande exposition centrée sur les liens de l’œuvre de Comès avec ces croyances traditionnelles qui, souvent, remontent à la préhistoire. On comprend immédiatement qu’il ne s’agit en rien d’une redite de l’exposition – très belle aussi – de 2012 au B.A.L. de Liège qui, elle, s’attachait principalement au talent de dessinateur de Comès.    

 


 

Le jeu de mots du titre Didier Comès, l’encrage ardennais recouvre l’exposition et les livres qui doivent en prolonger la portée. Le premier de ceux-ci s’attache à la sorcellerie et aux croyances magico-religieuses dans l’œuvre de Didier Comès. Conçue comme un vaste labyrinthe en noir et blanc avec quelques touches de couleur, l’exposition propose un cheminement thématique plutôt que chronologique au travers des albums et cela permet de se rendre compte de l’ampleur des champs abordés par l’auteur-dessinateur.

 


 

Dans l’exposition comme dans le livre, le propos est, en effet, de mettre l’accent sur la résonance des thèmes abordés par Didier Comès avec les grandes croyances des origines, dont le chamanisme, telles qu’on peut encore les ressentir chez les peuples premiers, telles aussi qu’elles survivent  dans certains aspects de la mythologie ardennaise.  Comme c’est également le cas pour Les Âges de la vie, naître, vivre et mourir en Ardenne, l’exposition permanente du Musée en Piconrue, la scénographie de L’encrage ardennais est particulièrement attrayante : sobre, dynamique, ouverte sur des objets et documents en relation avec les thèmes sur lesquels sont fondés Silence, La Belette et les autres œuvres de Comès.

 


 

 On notera que, ouverte jusqu’au 15 janvier 2017, l’exposition renouvelle les planches originales tous les trois mois, sans toutefois en changer les thèmes. Il s’agit seulement de sauvegarder les dessins originaux, qui, comme c’est aussi le cas des gravures, sont sensibles à une trop longue exposition à la lumière. (Musée en Piconrue, Place en Piconrue, 2, 6600 Bastogne, jusqu’au 15 janvier 2017, ma-di : 10-18h, fermé les 24, 25, 31 déc, 1er jan, Cette adresse email est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir. , www.piconrue.be , 061/55 00 55)

 


 

J’ai eu le plaisir de rédiger ce premier tome d’une trilogie explorant respectivement la sorcellerie et les croyances magico-religieuses, les nains et enfin la guerre à travers l’ensemble des albums de Didier Comès. J’y ai recherché les éléments qui témoignent des larges connaissances qui ont guidé mon ami Didier dans la création de ses albums. Un aperçu de la sorcellerie en Ardenne et des rapprochements avec des cultes anciens parfois encore en honneur dans des cultures contemporaines articulent ce premier ouvrage dont la très riche iconographie a bénéficié d’une séduisante mise en page.

 


 

(Référence : Albert MOXHET, Didier Comès, l’encrage ardennais, tome 1 Sorcellerie et croyances magico-religieuses, Bastogne, Musée en Piconrue, 2016. ISBN 978-2-930875-00-2. Diffusion Weyrich)

Photos de cette chronique : Dominique Hermans, Albert Moxhet.

Mise à jour le Samedi, 04 Juin 2016 00:14